Survivalistes : prêts pour l’apocalypse ?

Survivalistes : prêts pour l’apocalypse ?

11 avril 2020 0 Par jo'

Aujourd’hui, je profite du confinement pour m’évader un peu sur internet. Comme chaque jour en fait. Et on parlera de quoi ? De confinement. Dans un abri nucléaire. Changement de contexte. Je vous partage un petit documentaire signé RT France, sur les gens qui ont fait le choix aux USA de s’acheter un bunker, du plus petit jusqu’à l’ancien silo de missiles nucléaires reconverti sur plusieurs étages d’habitations.

 

Le documentaire

Une enquête sur le nouveau rêve américain d’obtenir l’abri de survie le plus chic.

Le survivalisme a une longue histoire aux Etats-Unis. Pendant des décennies, des citoyens inquiets ont cru qu’une catastrophe à grande échelle allait arriver et se sont donc préparés à survivre à cette éventualité. Ces gens préfèrent compter sur leurs propres compétences et préparatifs que sur la protection du gouvernement. Ces dernières années, le marché a réagi en proposant une gamme étendue d’abris, allant d’anciens bunkers militaires à des «appartements» de luxe souterrains. Notre équipe de tournage se rend dans le Midwest pour visiter les différents types d’abris et en discuter avec les locataires.

En savoir plus sur RT France : https://francais.rt.com/documentaires/71587-survivalistes-prets-pour-apocalypse

Petit documentaire sympa de 27 minutes, sans apriori et sans les commentaires débiles habituels des “journalistes” des chaînes que l’on ne citera pas. Chacun pourra se faire son propre avis, même si la question mériterai évidement d’être plus largement déroulée. Comme d’habitude à vous de creuser si cela vous intéresse, au moins du point de vue technique 😉

 

 

C’est ça le survivalisme ?

Le survivalisme, c’est simplement l’art de développer une résilience face aux crises. La vision qui est relatée dans le documentaire est celle d’une branche survivaliste sauce USA, avec tout ce qui l’accompagne. Pour les gens qui ignorent tout du survivalisme, il ne faut pas s’y méprendre : le bunker et la passion des flingues, c’est une conception parmi d’autres. Par ailleurs, c’est la vision la plus médiatisée, caricaturale, qui masque toute la diversité du mouvement survivaliste, ce qui amène à une méconnaissance totale du sujet pour le grand public par désintérêt.

Tous les survivalistes ne sont pas sur cette ligne, loin de là !

 

Mon avis

Alors je ne pense pas me fâcher avec beaucoup de gens en donnant un avis perso sur ce phénomène. Et puis si c’est le cas tant pis, je m’en fou en fait. Je ne jugerai pas les gens qui achètent un bunker. Peut-être que c’est eux qui ont raison en fait, qui sait ? L’avenir n’est pas prévisible en totalité et beaucoup de scénarios sont envisageables. La guerre nucléaire en fait partie, hélas.

 

Probabilité de guerre nucléaire VS armes biologiques

Cependant, à titre personnel j’ai un peu de mal avec l’idée d’une guerre nucléaire totale qui raserait la planète entière. Il est éventuellement possible que des grandes villes se fassent raser de la surface du globe par quelques missiles nucléaires, volontairement ou par “accident”, à la limite OK. Mais pas toute la terre dans son entièreté. Est-il nécessaire d’acheter un bunker pour se protéger des retombées radioactives ? Je conçois que cela peut se défendre techniquement, suivant le scénario. Mais encore faut-il y croire, justement. L’effondrement est inévitable, mais c’est le scénario qui est discutable.

Je partage avec certains l’idée que si la population mondiale venait à décroitre rapidement, se serait plus probablement du fait de virus ou de bactéries à fort taux de mortalité. Durant l’histoire, les cas ne manquent pas. Le COVID-19 est dangereux comme je le rappelais dans un précédent article sur les moyens de se protéger. Mais il ne nous tuera pas tous, loin de là, il s’en prend à toutes les personnes avec un terrain favorable à la maladie. En revanche, pour ceux qui ne le savent pas, les USA et la Russie détiennent en laboratoire des souches modifiées de la variole, pour la recherche, hein, même si à l’état sauvage elle n’existe plus. Sympa. Sans parler de tous les virus inconnus créés en labos militaires, malgré la convention internationale sur l’interdiction des armes biologiques… mais ce n’est pas le sujet. Bref, soit dit en passant, y a de quoi foutre un gros merdier quand on fait n’importe quoi avec la nature, que ce soit en détruisant les milieux ou en se prenant pour Dieu.

 

Relativiser l’utilité d’un bunker

Dans le cas de virus tueurs ou d’attaques chimiques, là aussi, un bunker peut s’avérer utile, mais il faut relativiser :

  • valable à court terme. On ne peut pas y survivre éternellement et l’autonomie n’est pas illimitée
  • l’isolation face aux pathogènes extérieurs doit être assurée. Les filtres à air sont-ils adaptés ? L’air peut-il être recyclé en interne comme dans les sous-marins ?
  • On a des outils pour mesurer la radioactivité extérieure, mais rien pour un virus inconnu, c’est là où le bât blesse. On ne peut donc pas savoir si l’extérieur est toujours contaminé X jours après le confinement.
  • comment peut-on savoir lorsque le moment de sortir est venu ? Le risque ne serait-il pas de sortir trop tôt ou de se faire contaminer en rencontrant des gens a postériori ? Il faut s’imposer une discipline de fer pour ne pas sortir respirer l’air frais et mettre le visage au soleil alors qu’il y a un danger…
  • en cas de contamination de l’environnement par des radio-éléments, même après plusieurs semaines, mois, années, les sols restes contaminés. Impossible de cultiver quoi que ce soit sans risques…
  • aurez-vous le temps de vous y réfugier en cas de réel danger ?
  • etc… les contraintes sont nombreuses !

Par ailleurs, quelle est l’utilité d’un bunker perdu au fin fond d’un trou paumé ? Ce n’est pas là que vous risquez de vous manger un missile nucléaire ! Par ailleurs, il faut aimer la solitude et le manque de lien social… C’est davantage dans une grande agglomération qu’un bunker peut trouver une utilité, car ce sont les grandes villes qui seront prises pour cibles ou qui subiront le chaos en premier. Or les personnes que l’ont nous a présenté sont précisément là où on ira pas les chercher. CQFD.

 

Fuyez les grandes villes

Dans tous les cas, pour vivre tranquille, le plus simple est de ne pas habiter les grandes villes en situation d’effondrement accéléré et de tensions internationales pour l’accès aux ressources vitales (eau, nourriture, énergie). Les grandes villes, même en “temps normal” c’est une source d’emmerdes pas possibles et une qualité de vie qui se détériore à grande vitesse. (qui a dit Paris ?) Alors je sais que certains défendent la possibilité d’une BAD citadine, avec les avantages et les inconvénients que cela comporte, je respecte l’argumentaire mais je reste convaincu de l’avantage du cadre des endroits plus “isolés” (mais pas trop quand-même).

 

La logique de la peur

Un des aspects qui m’a le plus frappé est cette logique de la peur qui imprègne certains survivalistes ayant acheté un bunker, en particulier chez les plus fortunés qui tentent de sauvegarder à tout prix leur petit confort. Chez ces derniers subsiste toujours une logique de (sur)consommation : piscine dans le bunker, TV, cuisine équipée, gadgets, etc. Les excès, c’est précisément ce qui nous a amené à la faillite de notre civilisation… vouloir les conserver n’est pas la solution. De toute manière, qu’on se le dise : à terme tout ces excès seront amenés à disparaitre progressivement… la règle sera au bon usage des ressources.

Pour être direct, je trouve assez malsain la disposition d’esprit de certains survivalistes US qui veulent se terrer tout seuls dans leur coin. On attend la fin. Même si il y a un monde différent après l’actuel à construire, ce dont je suis convaincu, on peut commencer à l’inventer dès maintenant, je dirai même que c’est obligatoire, sinon l’avenir, ça va être compliqué.

Je comprends bien qu’il y a un besoin de se rassurer en achetant un bunker. C’est comme une assurance en cas de crise. Je me demande comment certains font pour survivre avec de telles angoisses… Ils ont peur que l’on vienne les assassiner, que le monde soit dévasté de toutes parts par des bombes atomiques. Un scénario auquel ils croient mais qui ne se produira pas forcément. Il y a bien d’autres scénarios pour achever la civilisation actuelle ultra-fragile.

C’est très pessimiste et on en oublie que nous avons tous un rôle potentiel à jouer, bunker ou pas. Se protéger est une stratégie, mais la logique d’isolement a ses limites. Nous sommes des êtres sociaux et en règle générale, seul on ne survit pas longtemps. En cas de replis, les confinés devront bien un jour sortir de leur tanière…

 

La Base Autonome Durable

Je rappelle quelques règles de bon sens lorsque l’on choisit d’installer sa BAD quelque part :

  • elle doit être habitable et vivable sur une longue période. Des mois, des années, voire des décennies pour les meilleurs spots. La production de nourriture doit pouvoir se faire sur place, dans le jardin, sans quoi elle ne sera pas viable.
  • l’eau doit être accessible à proximité
  • penser à l’énergie : électricité, chauffage, bois, etc
  • une sécurité minimale est requise. un endroit sous le feu de l’ennemi ou trop exposé peut être dangereux
  • le lien social avec la ville ou le village est fondamental afin de se procurer tout ce dont on a besoin : biens, services, connaissances, entraide

Dans le cas du bunker, je trouve intéressant de réfléchir aux différentes problématiques d’ordre technique : recyclage des eaux usées, autonomie en eau et en électricité, nourriture, ventilation, protection contre les radiations, etc. Sur les aspects techniques, on retrouve un certain nombre de problématiques communes avec toute BAD (base autonome durable) lors d’une crise et c’est une bonne chose d’y réfléchir un peu. D’autant plus qu’il n’est pas interdit de disposer simplement une cave aménagée dans votre maison ou votre immeuble pour se protéger temporairement, au cas où, comme l’évoque très bien Piero San Giorgio dans son livre NRBC.

 

Le confinement peut tuer

Ce qui n’est pas évoqué dans le documentaire, c’est la capacité des gens à supporter le confinement. Et là autant dire que nous ne sommes pas tous égaux, et encore moins préparés. Alors suivant les goûts de chacun, on peut trouver très sympa le bunker aménagé de 200m², c’est un style de vie, on aime ou on aime pas. Bien aménagé façon hangar ça peut être cool, pourquoi pas. Les boîtes de conserves sous terre en revanche me foutent la trouille… pas vous ?

Il y a les gens qui vivent à l’année dans leur bunker/BAD, et les autres, qui pensent pouvoir y vivre, ou plutôt y survivre quand tout ira au plus mal, au point de s’enfermer dedans pendant… euh on ne sait pas trop combien de temps les gars, justement. Autant dire que vis-à-vis de ces derniers, je suis assez sceptique sur leur capacité à résister à un confinement en conditions réelles là-dedans…

Comme actuellement nous sommes majoritairement confinés, on a pas d’autre choix que d’apprendre à vivre dans la promiscuité, seul ou accompagné. C’est souvent là que ça se gâte. De nombreux exemples montrent que le confinement peut aggraver ou même créer la violence dans certains foyers. Hausse des violences faites aux femmes, aux enfants, tensions diverses, etc. Partager des ressources et un espace vital limité exige de prendre sur soi. En situation de stress réel, quelle sera la réaction des uns et des autres ? Rester longtemps enfermé peut rendre fou un certain nombre d’entre nous, c’est pourquoi même en pensant avoir tout prévu, on peut prendre une grosse baffe de réalité.

 

Pas de jardin ni de permaculture ?

Les boites de conserves et le lyophilisé c’est bien, mais on finira bien un jour par épuiser les stocks. Pour consommer, il faut pouvoir produire sa propre nourriture. Je suis étonné que le doc n’en parle pas. Peut-être un oubli de la part des journalistes, ou juste que c’est en cours de réalisation, ce qui me parait plus logique, en tout cas je leur souhaite, sinon il faudra qu’on m’explique comment survivre sur le long terme !

J’ai bien aimé le projet de communauté qui se crée sur un ancien site de l’armée.

un véritable champs de bunkers

Un champs de bunkers à vendre, perdus au milieu des USA !

Avec un tel espace, il est possible de produire de la nourriture en quantité suffisante, à condition de préparer le terrain assez tôt. On peut aisément s’imaginer un jardin-forêt aux alentours. Des arbres, des champs, des haies, des étangs, des animaux. Une vie agréable est possible dans ce genre d’endroits, à condition d’accepter des concessions sur le confort. Par ailleurs, on peut imaginer une vie en collectivité, les bunkers n’étant pas excessivement éloignés les uns des autres. Avec un accès à l’eau via des puits, il y a clairement un potentiel. Avec des aménagements, cet endroit pourrait devenir, qui sait, un nouveau modèle de société ? L’humain a su s’adapter aux difficultés climatiques, mais pourra-t-il encore se réinventer après une période aussi faste que nous avons connue ? L’avenir le dira !

Essayez juste d’imaginer comment vous pourriez organiser tout ça ! Même si leur position peut paraitre saugrenue, ils sont peut-être très bien placés pour inventer un futur viable. Bâtir une communauté, construire des bâtiments supplémentaires pour l’élevage, etc. Tout dépendra de leur état d’esprit et c’est cela qui déterminera leurs chances de survie. La mentalité far west du fin fond de l’Amérique sera peut-être remise en question par les évènements futurs. La question est : comment vont-ils imaginer leur avenir collectivement ?

 

Pour aller plus loin

Je vous recommande la lecture des livres de Piero San Giorgio qui expliquent la préparation, la résilience et la survie en période d’effondrement. En attendant leur réédition prochaine car pour le moment ils sont en rupture de stocks, victimes de leur succès 😉 Des ouvrages de référence à lire avant qu’il ne soit trop tard.

 

NRBC

NRBC : survivre aux évènements nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques